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Frédéric Nihous : « Les flux migratoires doivent être inversés »

Candidat pour la deuxième fois consécutive à l’élection présidentielle,  Frédéric Nihous a accepté de répondre aux questions d’Infos Bordeaux. Le représentant de CPNT (Chasse, Pêche, Nature, et Traditions), nous donne son point de vue sur le positionnement politique de son parti, son analyse de l’immigration en France, ainsi que ces chances de succès en avril prochain. Entretien sans langue de bois.

Infos Bordeaux : Vous avez été permanent pendant plusieurs années au RPR. CPNT est l’allié de l’UMP. Est-ce que vous vous considérez comme « l’aile rurale » de la majorité ?

 Frédéric Nihous : CPNT–Le Mouvement de la ruralité a conclu une alliance avec l’UMP dans le cadre des élections régionales de 2010 sur base d’un accord programmatique. Je n’y suis pour rien si le Parti socialiste refuse tout accord avec nous en raison de sa soumission aux diktats des Verts ! Quant à mon passé au RPR, je l’assume sans aucun complexe, mais je demande à ce que l’on me reconnaisse le droit d’avoir évolué, comme on l’accorde à Jean-Pierre Bel, le nouveau président socialiste du Sénat, qui vient de la Ligue communiste révolutionnaire, ou à Jean-Luc Bennahmias, dirigeant du Modem après avoir été le secrétaire national des Verts, ou encore Maurice Leroy, actuel ministre Nouveau Centre qui fut au Parti communiste par le passé, et il y en a d’autres…

Pour le reste, je me considère comme « l’aile rurale des partis politiques français » : je suis totalement indépendant, quoi qu’il m’en coûte, et je suis le porte-parole des 15 millions de Français qui vivent dans les zones rurales. Mon obsession est de veiller à ce que les ruraux aient leur part de progrès et de développement dans ce pays et à la préservation de leurs traditions, et que l’on cesse de les considérer comme des intrus dans leur milieu naturel qui est avant tout leur bassin de vie !

Depuis des décennies, le monde rural est le grand oublié des politiques publiques qui ont privilégié la « politique de la ville », dont vous savez aussi bien que moi les résultats désastreux. En une vingtaine d’années, 90 milliards d’euros ont été engloutis dans cette politique d’achat du calme dans les « quartiers » alors que dans le même temps, la ruralité ne bénéficiait que de saupoudrages épisodiques. Maintenant, ça suffit ! Je veux faire de la ruralité une grande priorité du prochain quinquennat.

Vous définissez CPNT comme le « parti de la ruralité ». En dehors d’être un concept flou, pourquoi se priver de 80 % du corps électoral ?

Tout d’abord, je vous l’ai dit, le monde rural compte 15 millions de Français. C’est un quart de la population de la France et, en raison de sa structure démographique, nettement plus d’un quart du corps électoral.

Et la ruralité n’est pas un concept flou ! Le ruralisme est un courant de pensée qui s’est développé au XIXe siècle face aux ravages sociaux, démographiques et sociétaux de la révolution industrielle, et qui renvoie tout simplement au besoin d’adéquation entre l’homme et son territoire, d’harmonie entre l’homme et la nature, et entre l’homme et ses communautés naturelles.

Le rural, c’est bien sûr celui qui vit à la campagne. Mais la ruralité va bien au-delà et ne doit pas en outre se limiter à une approche purement agricole comme ce fut le cas pendant des décennies, surtout à droite ; le concept est bien plus vaste. En ce temps de crise, la ruralité, avec tout ce qu’elle comporte de valeurs et de traditions, est la seule véritable « valeur refuge ».

Les Français le sentent bien, qui sont chaque année plus nombreux à aller se ressourcer dans leur région natale, qui y exercent de nombreuses activités de nature et de loisirs, qui plébiscitent les fêtes traditionnelles ou les marchés de terroirs, qui partent en quête de leur arbre généalogique comme nulle part ailleurs en Europe, etc. Il y a un retour aux racines et en France, elles sont rurales : tous les Français, y compris en ville, ont un peu de boue sur les chaussures ! Ils ont compris, au fond d’eux-mêmes, qu’on ne peut garantir de « France durable » qu’en l’ancrant sur des fondations solides, qu’il faut des racines fortes pour préparer un avenir serein !

Le projet politique que je porte se veut donc un projet pour tous les Français, dans lequel chacun, attaché à la France et à son identité, et la pérennité de celles-ci, peut se retrouver, des champs à la ville.

Pourquoi vous voit-on si peu à la télévision ?

Voilà une excellente question ! Je l’ai d’ailleurs posée par écrit à Michel Boyon, président du CSA, le Conseil supérieur de l’audiovisuel. Il m’a répondu par une lettre du 27 octobre qui se limite à des considérations générales sur l’équilibre du temps de parole à la radio et à la télévision que le CSA n’a pas les moyens coercitifs de faire respecter ! Ce courrier établit juste que le CSA ne sert à rien, à part à inaugurer les chrysanthèmes de la liberté d’expression et de l’égalité de traitement.

Les médias nationaux continuent donc de choisir qui a le droit de s’exprimer et qui disparaît des écrans ; qui a le droit d’y faire campagne et qui en est exclu. C’est un vrai problème éthique et politique puisque cela tend à montrer que le choix électoral est opéré par les seuls médias et qu’ils ne veulent pas que j’en fasse partie, d’où le fait que je suis ostracisé. Mais faites-moi confiance, cela va changer dès la rentrée de janvier !

Si CPNT défend une certaine idée de la tradition et de l’identité, pourquoi ne vous entend-on pas sur la question de l’immigration massive ?

Parce qu’on ne me pose jamais la question !

Eh bien je vous la pose !

Alors je vous réponds.

L’immigration – dont je fais partie en tant que descendant d’immigrés polonais, tchèques, belges et hollandais – s’est considérablement modifiée et amplifiée depuis le début des années 1980 et est venue modifier tant la structuration du pays que les domaines politique, culturel, économique et social.

Aussi, au regard de la situation, notamment avec la crise actuelle, les flux migratoires doivent être repensés et inversés.

Il y a une immigration légale, liée surtout à l’économie. Dans certains secteurs, les besoins sont réels. Dans d’autres, absolument pas. Cette immigration économique doit être maîtrisée et réduite d’autant que nous sommes en situation de crise, et conditionnée à un contrat préétabli par un employeur.

Pour ce qui est de l’immigration illégale, celle-ci, par définition, doit être supprimée : il faut procéder au renvoi de tous les immigrés clandestins en situation illégale ; c’est la simple application du droit et de la loi.

Et pour éviter ces dérives, préjudiciables à tous y compris aux immigrés réguliers, il faut arrêter de faire de notre pays un véritable eldorado pour les clandestins. Je pense en premier lieu à l’Aide médicale d’Etat (AME), grâce à laquelle les soins médicaux des immigrés clandestins sont pris en charge à 100 % ainsi que le forfait hospitalier ! C’est une véritable incitation à l’immigration clandestine et une injustice sociale à l’égard des Français (et des étrangers en situation régulière) dont les remboursements de soins ne cessent de baisser et qui doivent, quand ils le peuvent, payer une mutuelle pour être remboursés correctement, ce que ne peut d’ailleurs pas faire un Français sur quatre ! Je précise que l’Aide médicale d’Etat nous coûte chaque année dans les 600 millions d’euros ! Puisqu’on cherche des économies, en voici une à réaliser immédiatement.

En parallèle, la France doit agir auprès des pays d’émigration en revoyant sa politique d’Aide publique au développement (APD). Nous allons débloquer l’an prochain – cela figure la loi de finances pour 2012 – 10 milliards d’euros au titre de l’APD, dont 60 %, soit 6 milliards d’euros, à des pays d’Afrique sub-saharienne. Et cela sans aucun engagement des pays bénéficiaires à œuvrer concrètement pour le développement local pour toute leur population, et donc à faire cesser l’émigration de leurs ressortissants vers l’Europe !

L’Aide publique au développement doit être revue pour que les ressortissants des pays bénéficiaires n’aient plus de motifs d’émigration parce qu’ils auront chez eux les moyens de vivre dignement. La France doit mener une vraie politique de coopération sur la base d’accords bilatéraux avec chaque pays concerné.

Alors oui à des aides, mais sous condition d’engagements des pays bénéficiaires à mettre en œuvre une vraie politique locale de développement, qui fera cesser l’émigration et fera rappeler au pays leurs ressortissants pour participer à celle-ci !

Les circuits de financement doivent également être revus, afin de privilégier l’aide directe aux populations et à leurs projets concrets. Nous éviterons ainsi ce que j’appellerai pudiquement les « déperditions par le haut »…

Pour vous qui dénoncez « l’écologie punitive », les frasques d’Eva Joly doivent être un cadeau du ciel ?

Effectivement, on voit que les Verts sont dans le fruit et que cette candidate, passée un temps par les réseaux et l’aventure Bayrou, « n’en rate pas une » pour développer des idées fumeuses, déconnectées des réalités du terrain et des besoins des Français… Lunettes rouges, panoplie verte et bretelles rose, la France va en finir marron ! On pourrait en rire si ce n’était pas l’avenir de la France qui est en jeu, et ces gens-là semblent arriver à un point extrême de détestation de la France, de ses valeurs et de ses symboles. Regardez leurs positions et revendications contre le 14-Juillet, contre la célébration du 11-Novembre ou tout récemment leur volonté de supprimer le siège et le droit de veto de la France au conseil de sécurité de l’ONU, ce qui revient à demander la mort diplomatique de la France !

Ils ont le même irrespect pour les habitants de nos terroirs qu’ils considèrent comme des gêneurs à exclure, eux et leurs activités économiques ou traditionnelles comme la chasse par exemple. Donc si elle est un cadeau, c’est surtout un cadeau empoisonné !

Ferez-vous comme Christine Boutin qui a annoncé son désistement avant le premier tour si Marine Le Pen menace Nicolas Sarkozy ?

Le jour même où Christine Boutin s’est déclarée candidate à l’Elysée, elle a aussi annoncé qu’elle prendrait sa retraite politique à 70 ans, soit en 2014. Pour quelqu’un qui postule à la présidence de la République de 2012 à 2017, vous avouerez que c’est curieux…

Pour ma part, je suis candidat à l’élection présidentielle, en portant un projet que je considère utile et efficace pour le pays et le peuple. La seule chose qui pourrait m’arrêter, ce serait de ne pas avoir les 500 parrainages, mais je suis tout à fait confiant. Je suis d’ailleurs sur ce plan en avance sur mon tableau de marche de 2007, lors de la précédente campagne présidentielle.

Une étude de l’Ifop pour le Cevipof, le Centre de recherches politiques de Sciences Po, publiée hier 30 novembre, indique que Marine Le Pen fait un tabac chez les chasseurs, avec 25 % d’intentions de vote. Cela doit vous inquiéter.

Cette étude a été surinterprétée. Il n’a pas été dit par exemple que, selon les travaux de l’Ifop, 19 % des chasseurs ne se sont pas prononcés sur leur intention de vote, ni que 36 % d’entre eux ont déclaré ne pas être certains de leur choix, autrement dit qu’ils voteront peut-être pour quelqu’un d’autre. On a donc tiré de cette étude des conclusions hâtives qui n’ont pas lieu d’être puisque le fait dominant est qu’environ un chasseur sur deux ne sait pas encore avec certitude pour qui il va voter !

En fait, le seul enseignement clair de cette étude est que le vote des 1,3 million de chasseurs-électeurs sera un vote protestataire. Or l’une des caractéristiques du vote protestataire est qu’il ne se cristallise que dans les dernières semaines de campagne, juste avant le vote lui-même.

Pour le moment, je n’ai pas de visibilité médiatique à l’inverse de Mme Le Pen qui, elle, est surmédiatisée. Dès lors que la campagne officielle sera lancée, avec égalité de temps de parole pour tous les candidats, les chasseurs verront très clairement qui connaît leurs dossiers, qui les représente vraiment et qui agit véritablement pour eux. Je n’ai donc aucune inquiétude à ce sujet d’autant que je suis chasseur moi-même, que CPNT est le parti traditionnel de défense de la chasse et que je pourrai alors montrer qu’en matière de chasse, j’ai avec CPNT un vrai bilan avec de vrais résultats.

Au-delà des chasseurs, vous êtes aussi nettement distancé par Marine Le Pen dans le vote rural.

Le monde rural dans son ensemble doit comprendre qu’il ne survivra et ne se développera qu’en s’ancrant dans ses traditions. C’est le T de CPNT. Et les traditions, ce sont d’abord les traditions de nos régions qui ne sont absolument pas défendues par la candidate qui veut tout recentraliser à Paris, qui, à titre d’exemple, est hostile à la corrida, s’oppose à l’enseignement des langues régionales, veut supprimer les conseils régionaux, etc. C’est le retour à la IIIe République dans ce qu’elle a eu de pire, à savoir son combat de tous les instants contre tous les particularismes locaux et contre toutes les identités constitutives des différentes composantes du peuple français.

Au-delà de cette évidence, cette candidate qui habite Saint-Cloud ne connaît rien aux véritables conditions de vie dans le monde rural. Là aussi, les ruraux verront que moi, je suis un vrai rural : habitant non pas les beaux quartiers parisiens mais Baudreix, un village de 560 habitants dans les Pyrénées-Atlantiques, au cœur de la ruralité et aux pieds des montagnes, là où, élu local, je me débats pour régler au quotidien les problèmes de ce monde rural et de sa population.

Cela, les électeurs du monde rural vont vite le comprendre, une fois que la campagne aura véritablement démarré et que les médias nationaux m’auront ouvert leurs portes.

Entretien réalisé par Bertrand Lescure pour Infos Bordeaux

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